Le magazine culturel « Culture Chronique » a interrogé Marie Charrel a propos de « Une fois ne compte pas », l’écriture, ses projets…
Voici le début de l’entrevue :
Marie Brétigny – « Une fois ne compte pas » est votre premier roman. Comment vous en est venue l’idée ?
Marie Charrel – En observant. Un jour, je me suis rendu compte que beaucoup de personnes, si ce n’est la majorité, vivent avec un regret ancré au cœur. Ou plutôt, qu’un regret les empêche de vivre : « si j’avais achevé mes études / si je n’avais pas quitté cet homme / si j’étais né ailleurs… ma vie serait meilleure.» Malheureusement, ce « si » est bien souvent un prétexte à l’inaction et à l’auto-complaisance dans la tristesse. Je me suis amusée à étudier comment réagiraient des personnages projetés dans cette vie qu’ils regrettent de ne pas avoir eue. Évidemment, celle-ci ne s’avère pas aussi facile et plaisante qu’ils se l’imaginaient.
Marie Brétigny – Vous êtes diplômée de l’IPJ. Lorsque vous avez commencé vos études de journalisme, pensiez-vous déjà à l’écriture d’un roman ?
Marie Charrel – Oui. J’ai toujours eu des histoires plein la tête. Trop. Enfant, je vivais en permanence dans un ou deux mondes parallèles, c’était parfois insupportable. Il m’a fallu du temps avant de comprendre que la solution pour me libérer de ces histoires était de les écrire. C’était bien avant d’entrer en école de journalisme.
Marie Brétigny – La description des émotions de vos personnages est d’un grand réalisme. On sent par ailleurs un vrai goût pour l’inventivité sémantique : « Tordue-bricolée », « coureuse empêchée » sont des expressions qui caractérisent aussi votre style.
Marie Charrel – Je ne trouve jamais le vocabulaire idéal pour décrire parfaitement l’état d’un personnage. Son intériorité. Celle-ci est souvent trop complexe et nébuleuse pour se résumer à un seul mot. Les mots eux-mêmes sont souvent trop connotés. Ils sont sujets aux modes, détournés de leur sens premier. Pour contourner ce problème, j’en accole plusieurs. J’aime les images qu’évoquent les associations de mots. Quand je dis « tordue-bricolée », je vois un arbre au tronc torturé tenant debout grâce à des planches et des clous, ou bien une cabane d’enfants rafistolée avec de la ficelle. Le lecteur, lui, voit sûrement autre chose : cela me plaît.